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Mini en mai réussie pour Matthieu

 La Mini en mai est une des grosses épreuves de la saison Mini 6,50 en Atlantique : une course de 500 miles au départ et à l’arrivée de la Trinité sur Mer et dont le parcours emmène les skippers au bout de la Bretagne contourner le Raz de Sein puis une descente jusqu’au niveau de l’estuaire de la gironde et retour au point de départ. Matthieu revient sur son défi réussi. 

Le briefing météo nous annonce une première journée humide et venteuse, mais avec une mer qui ne sera pas dans le bon axe. Cela signifie que ça va bouger sur nos petits bateaux. Le matin du départ, il y a un mélange d’excitation et d’intimidation car je vais jouer avec 99 autres concurrents sur l’eau. Nous savons que nous devons essayer de rallier le Raz de Sein le plus vite possible pour passer la zone de courant dans le bon sens.

 

Sur la zone de départ, le vent attendu est légèrement moins fort que prévu, mais au loin, les nuages et les couleurs du ciel m’indiquent que le vent pourrait bien rentrer plus fort que prévu. Je décide donc de partir un peu sous-toilé, d’accepter de rester en arrière de la flotte et d’éviter des changements de voiles de dernière minute au milieu des autres concurrents. Cela évite le risque que les bateaux se touchent pendant que les skippers travaillent sur la plage avant.

Passage de la première marque de parcours sous un déluge de pluie, un élément avant-coureur et significatif que le vent va arriver fort. Pendant que certains s’activent pour réduire leur voile, j’en profite pour prendre de bonnes trajectoires en direction des Glénants, avec un vent qui monte crescendo.

À partir de là, les 12 à 18 heures suivantes deviennent épiques : le vent est 1,5 fois plus fort que ce que les fichiers météo annonçaient, la mer est toujours dans le mauvais sens et hachée, ce qui rend nos bateaux affreusement inconfortables. Je croise un premier bateau dont le mât est cassé en deux, c’est Jordan du même centre d’entraînement que moi. Puis les messages à la VHF entre les skippers et les services de sécurité deviennent de plus en plus présents : les démâtages continuent, un bateau a une importante voie d’eau à cause d’un safran arraché. Certains skippers sont impressionnés par cette machine à laver géante et préfèrent abandonner plutôt que de continuer avec un manque de lucidité qui pourrait aggraver la situation. C’est aussi cela le sens marin : savoir se retirer dans les éléments et rentrer en sécurité au port.

À mon tour de subir une avarie : l’aérien du bateau, qui se trouve en tête de mât, est arraché dans un énième fracas contre les vagues. En plus de voir ce capteur primordial tomber dans l’eau, mon pilote automatique perd d’un coup toutes les informations relatives au vent, notamment la force et la direction. Cela signifie que le pilote ne fonctionnera plus qu’avec le mode « compas », ce qui engendre une énorme perte de performance.

J’hésite à abandonner car je me dis que faire encore 80% de la course avec une telle perte de performance est dommage, mais je refuse d’abdiquer. J’ai abandonné lors de la course précédente, donc il n’y aura pas de second revers successif.

De plus, ça fait 3 semaines que je suis éloigné de ma famille pour ce bloc de courses. L’image que je veux transmettre aux enfants est que malgré les difficultés, il est possible d’atteindre ses objectifs. ET HOP, JE RESTERAI EN COURSE !

Le lendemain matin, le vent se calme un peu, mais tous les bateaux sont en retard par rapport aux itinéraires prévus. Même si je ne suis pas trop mal positionné, j’arrive au moment de la renverse de courant au Raz de Sein… C’est dommage de voir les copains partir sans moi.

La lumière du jour et le soleil me permettent de découvrir une zone magnifique, impressionnante, qui confirme qu’il s’agit effectivement d’une zone peu hospitalière pour la navigation.

Quelques heures plus tard, nous contournons la bouée de l’occidentale de Sein et nous voilà enfin sur le bord le plus favorable pour nos bateaux : un long bord de portant (vent dans le dos) sur une distance de 190 miles.

Cependant, sans les informations sur le vent, je sais que les 20 prochaines heures vont être assez mouvementées ! Le bateau se couche sur l’eau lors des longues glissades, et le spi max du bateau va exploser dès la première heure de descente… Aïe.

Je change de voile avant pour le spi médium et tant pis, je vais encore perdre en performance. Alors, je vais essayer de suivre la trajectoire la plus courte possible pour compenser. Heureusement, les dauphins viennent en famille me confirmer que malgré les difficultés, la nature est toujours remplie d’émerveillement.

Arrivé au point le plus au sud du parcours, la remontée se fera au gré des vents qui s’orientent selon les périodes nocturnes et diurnes, les nuages et les zones ensoleillées.

Passage devant La Rochelle, mais il reste encore une centaine de miles à parcourir ! Et à la VHF, on commence à entendre les bateaux qui ont abandonné et qui retournent à leur port d’attache. J’apprends qu’environ 50% de la flotte a abandonné. Waouh, c’est impressionnant.

Toute la remontée se fera au contact d’autres bateaux, dont celui de Charles, un Rochelais comme moi. Nous franchissons la ligne d’arrivée à quelques minutes d’intervalle, avec la satisfaction commune d’être allés au bout d’une course qui n’a pas failli à sa réputation.

Maintenant, place à la récupération, au retour à terre à Toulouse, au travail et à la remise en état rapide du bateau afin de reprendre les entraînements en vue de la Mini-transat le plus rapidement possible.